ALLER-RETOUR A SAN REMO (en moins de 24 heures)
Faire l’aller-retour Ă San Remo en moins de 24 heures, encore un dĂ©fi de folie, je me l’Ă©tais lancĂ© pour rendre hommage Ă Carlos, disparu en septembre dernier. La barre Ă©tait haute, mais plusieurs sources de motivation m’ont poussĂ© Ă le faire.
En souvenir de Carlos, avec qui on s’Ă©tait rendu en 2017, lors d’un week-end de mai, entre le Festival de Cannes et les essais du Grand Prix de F1 Ă Monaco qui nous avaient ralenti, pour se prĂ©parer aux longues distances. Par la suite, nous y sommes repassĂ©s Ă l’aller et au retour de notre pĂ©riple Balkan’it.
Des souvenirs qui ne s’oublient pas, avec des moments forts, Ă©piques, empreints de nostalgie maintenant. La fin de la situation d’urgence et ma vaccination m’ont permis de faire cette route de nouveau, et de voir ce que j’Ă©tais capable de faire sur plus ou moins 24h, autre source de motivation, et de rester dans l’ambiance de la longue distance, ne participant cette annĂ©e Ă aucune compĂ©tition du genre, la faute Ă la situation sanitaire.
2 fois 236 kms avec au final plus de 5000m de dĂ©nivelĂ©, je m’y Ă©tais prĂ©parĂ©, avec mon dernier voyage en ArdĂšche. J’ai fait ça en semaine, pour Ă©viter le week-end surchargĂ© de voitures et camions, et vu que je suis en congĂ© pratiquement tous les mercredis depuis le dĂ©but de l’annĂ©e. L’idĂ©e Ă©tait de partir mercredi Ă 4h et de revenir jeudi au plus tĂŽt la nuit suivante, sachant que jeudi matin, je devais ĂȘtre au travail. J’ai interverti un des mes jours de prĂ©sence au bureau avec vendredi. Mon vĂ©lo prĂȘt avec le prolongateur de cintre, ma roue Ă dynamo, l’Ă©clairage et la sortie usb pour charger le gps, j’Ă©tais parĂ©.
Je n’ai vu que la 1Ăšre mi-temps du match Italie-Espagne, j’ai eu du mal Ă m’endormir en me couchant plus tĂŽt. RĂ©veil Ă 3:30, un cafĂ© et petit dĂ©jeuner light, ma musette de ravito Ă©tait pleine Ă ras-bord, pour Ă©viter de m’arrĂȘter manger et pour perdre le moins de temps possible, je suis parti Ă 4h pile.
J’ai eu la chance de ne pas avoir de vent, ni dans un sens ni dans un autre, j’ai donc bien avancĂ© le matin, connaissant la route par coeur, l’ayant dĂ©jĂ faite jusqu’au km 130. Le jour s’est vite levĂ©, la montĂ©e sur Bagnols-en-ForĂȘt, puis Peymeinade, Grasse, bien pentue mais bien avalĂ©e, je suis arrivĂ© Ă Nice pas au meilleur moment, Ă midi, avec beaucoup de circulation et le soleil qui tapait bien. La montĂ©e sur Eze Ă©tait la derniĂšre difficultĂ© de l’aller, je suis arrivĂ© Ă San Remo vers 14h30. Je me suis arrĂȘtĂ© prendre 2 photos et boire un soda avant de repartir pour le retour sans tarder
Mon compteur a bloquĂ© vers le km 180, j’ai dĂ» le redĂ©marrer sans perdre ma sortie mais m’a fait enregistrer 2 sorties. Pas grave mais encore quelques minutes de perdues, comme les 2 sauts de chaĂźne survenues, l’arrĂȘt aux points d’eau ou dans des bistros pour remplir mes bidons. Je me suis toujours bien alimentĂ© et j’ai bu tant que je pouvais, je n’ai pas eu de souci physique jusque-lĂ .
Le retour Ă la frontiĂšre, je ne l’ai pas vu passer, vite arrivĂ© Ă Menton puis passant par Beausoleil au-dessus de Monaco, l’itinĂ©raire créé avec Komoot m’a fait passer par un chemin insensĂ©, le chemin des Romains, avec des pentes affolantes que je n’ai pas supportĂ©, mais aprĂšs je savais que j’allais ne faire que descendre jusqu’Ă Nice. Prenant la promenade des Anglais et la piste cyclable pour Ă©viter les feux, je suis arrivĂ© Ă Cagnes-sur-Mer oĂč il fallait que je reprenne la mĂȘme route ou presque qu’Ă l’aller. Je savais que je n’Ă©tais pas en avance, mais j’ai fait ce que je pouvais.
AprĂšs Peymeinade, j’ai repris la route qui mĂšne Ă Bagnols et c’est lĂ que le compteur a complĂštement buguĂ©, ne m’affichant plus de fond de carte, je l’ai redĂ©marrĂ©, mais rien Ă faire, j’ai utilisĂ© le tĂ©lĂ©phone et Komoot pour me repĂ©rer et m’assurer que j’Ă©tais sur la bonne route. La nuit, on n’a pas les mĂȘmes repĂšres visuels. Je suis donc reparti sans cartographie, en me disant que j’allais bientĂŽt arriver sur la route que je connais par coeur. ArrivĂ© Ă La Motte, le plan de circulation m’avait dĂ©jĂ perturbĂ© l’autre jour et j’ai dĂ» demander Ă des personnes le bon chemin pour aller sur Les Arcs. ArrivĂ© aux Arcs, je croyais avoir pris le bon chemin mais non, arrivĂ© au centre, lĂ aussi, j’ai dĂ» demander mon chemin. Vidauban, Le Luc, ça y est, je sais qu’il me reste 73 kms et je connais la route.
J’ai commencĂ© Ă avoir mal aux pieds qui me brĂ»laient, obligeant Ă m’arrĂȘter pour faire circuler le sang. Pour le timing, j’avais 20 mn d’avance Ă l’aller sur mes prĂ©visions, presque 1h de retard Ă ce moment-lĂ . Mais les moins de 24h Ă©taient encore jouables, Ă quelques minutes prĂšs. Je me repassais dans la tĂȘte l’Ă©tape du Tour de France oĂč Cavendish a dĂ» sprinter sur les derniers kilomĂštres pour Ă©viter le hors-dĂ©lai, Ă 1mn30 prĂšs.
A partir de lĂ , j’ai continuĂ© la route jusqu’Ă Flassans/Issole mais aprĂšs, j’ai ratĂ© la bifurcation sur Besse/Issole, comme quoi quand on croit connaĂźtre la route, entre la fatigue, le manque de luciditĂ©, le manque de repĂšres visuels la nuit, sans gps qui fonctionne correctement, on peut se rater.
Et me voilĂ embarquĂ© sur la mauvaise route, je voyais bien que ça ne ressemblait pas Ă la route que je connaissais avec des lignes droites interminables faites de faux plats montants… Quand j’ai vu apparaĂźtre le panneau Brignoles, j’Ă©tais dĂ©goĂ»tĂ© et j’ai mis 10mn Ă m’en remettre, hĂ©sitant Ă poursuivre sur Tourves avec donc plus de kms que prĂ©vus, et donc le dĂ©fi qui s’envole pour quelques minutes. Abattu, j’ai repris la route avec toutes les douleurs qui ressortent et surtout une lassitude, trop d’heures de vĂ©lo, c’est trop, je n’ai pas eu Ă lutter contre le sommeil, mais le mal aux fesses et aux pieds, c’est ce qui a Ă©tĂ© le plus dur. J’ai fini par arriver vers 4:40, avec qu’une envie, me laver et me coucher.
Avec ce dĂ©tour, j’ai quand mĂȘme dĂ» faire moins de dĂ©nivelĂ©, j’avais comptĂ© 5600m finalement j’en ai pour 5243m, mais 488,5 km en 22:34 de selle + 2:04 d’arrĂȘts donc une moyenne de 21,8 km/h.
A l’aller, 10:04 de selle avec 39mn d’arrĂȘt quand mĂȘme, et pour le retour, 12:30 de selle avec 1h25 d’arrĂȘts, essentiellement pour acheter Ă boire, perdre du temps pour la navigation et demander mon chemin, faire passer mon mal aux pieds. Toujours les mĂȘmes problĂšmes, je sais oĂč j’en suis…
Mais finalement, je suis content d’avoir relevĂ© ce dĂ©fi, par moments, j’Ă©tais en train de parler (dans ma tĂȘte) Ă Carlos.
HĂ©, Carlos ! Tu te rappelles quand on allait faire ces brevets Ă Aix ? On partait Ă 4h pour s’y rendre, s’inscrire et partir Ă l’horaire de dĂ©part prĂ©vu Ă 5h…
Oui, je sais que tu adorais ces randos et faire ces longues distances. Et que tu n’avais pas toujours le temps pour en faire plus.
Et Ă San Remo, tu te souviens de cet hĂŽtel oĂč il y avait des fils Ă©lectriques qui pendaient partout ? T’avais oubliĂ© ton tee-shirt en partant. Et quand on y est repassĂ© pour aller jusqu’en GrĂšce, ce cycliste italien super sympa, avec qui t’avais Ă©changĂ© ton profil Strava…
Quoi, ce dĂ©fi ? oui je sais, c’est un peu n’importe quoi, mais il fallait bien que je le fasse, t’es parti avant moi…